Le 24 août 1572, et les jours suivants, à Paris et dans une vingtaine de villes de France, entre 10 000 et 30 000 assassinats furent perpétrés, souvent avec une horreur indescriptible. On en garde la mémoire sous le nom (triste ironie) de Saint Barthélemy. Ce crime de masse suscita dans toute l’Europe alors une grande émotion. Aujourd’hui encore, cet obscur événement marque nos mémoires. C’est que de nos jours les entrelacements complexes entre la raison d’État, les intrigues diplomatiques et courtisanes, les ambitions impérialistes, les passions extrémistes des religieux fondamentalistes et les flambées de violence de type pogrom qui se sont alors mêlés sont toujours d’actualité. En ce sens, c’est un événement historique. Est-il possible de démêler ce nœud d’implications ? Il semble qu'aujourd’hui ce soit plus qu’utile, nécessaire ! Si possible ! Au moins d’essayer d’y voir un peu plus clair !
Je traiterai d’abord des circonstances au XVIe siècle, car tout événement est singulier : Ce sont les guerres dites de religion, rivalités de pouvoir, rapports confus entre foi religieuse et légitimité étatique, aggravés par les tensions économiques et sociales… Puis je résumerai ce qu’on sait – peu de chose en fait – et les responsabilités, partagées, de ce crime de masse. Enfin, les conséquences immédiates, la portée politique à terme (jusqu’à la Révolution de 1789) et peut-être aujourd’hui encore. Car pour moi, ce massacre de masse provoqué au nom de la raison d’État, et perpétré par la foule, a marqué nos mémoires d’une tache indélébile et entretient dans nos pensées une question existentielle qui émerge à nouveau dans l’actualité : attentats, guerres et conflits d’opinions. Je propose, non pas d’apporter des éléments de solution, mais un peu de recul grâce à l’histoire.
Étienne Maquin